Étiquette : Patiras
Montée entre ciel et terre
Le chemin est rude jusqu’aux bambous, caresse de saule pleureur .
Cheminer vers les lampes immobiles.
Les flots peuvent bien s’enrouler autour de leurs cordées de vase
Cheminer et se sentir nu de parole.
Feux, derniers feux ; rayons de miel sur le visage ; la soirée s’alanguit un instant
Cheminer en soi, être aspiré par la mémoire honorant le paysage
Au passage, l’horizontale, avant les mots dressés, scandés, chantés, criés.
Générosité.
Paroxysme.
Parole semée…
Soudain le Milan surgit…sur un texte du photographe écrivain MICHEL QUÉRAL
« Migrateur sans frontières : le temps du milan
Début mars. Le ciel de l’estuaire est plombé. Les premières tulipes sauvages balancent leurs flammes jaunes entre les squelettiques pieds de vigne de Tayac où les premiers bourgeons commencent à percer.
Chahuté par le vent d’Ouest qui balaie la rive en rafales, un Milan noir surgit de nulle part. C’est mon « premier de l’année » !…
Mais bien vite l’estuaire nous rappelle et les paroles d’ilouts surgissent en mélopée, lancinantes, mélancoliques …
Sur ses chemins ma vie sauvage(extraits) David de Souza-Armand Florea
« Né(e) sur Sans-Pain né(e) sur Bouchaud
Sur Patiras à l’île verte
Mon papa faisait le bateau
Un papa extraordinaire
Parti trop tôt, parti trop tôt
On a vécu comme sur l’eau
Au milieu d’un lit de rivière
Une pièce en bas une pièce en haut
Dans de fortes maisons de pierre
Mais pas à terre mais pas à terre…
***
On grimpait aux arbres, on guettait
Le paysage de la vie
Des cabanes à pique-cerises
L’espace c’est pas ce qui manquait
On s’évadait on s’évadait
Le défendu se promenait
Entre la digue, le bord de l’eau
On arrivait à monter là-haut
Tout en haut de la liberté
En bois flotté en bois flotté… »
Chemin faisant les feux empreintes s’interpellent
les lianes s’enroulent autour du poignet
se déposent en offrandes à nos pieds
unis en signe de ralliement
comme le ciel, la terre et les arbres
sous la voûte d’ombre que gagne le noir.
Dernières visions avant le départ.
« Les heures passées au bord de l’eau sont à déduire de celles passées au paradis »
RENÉ FALLET, LES PIEDS DANS L’EAU.
« Je suis les liens que je tisse »
Théodore Monot
Sentinelles sur la digue
Drapeaux rouges de la mémoire
Ne le dites à personne :
Quand le vent vous visite
Quand les étoiles filantes suivent l’arc ou la voûte
Quand la rosée monte ou le chant des grillons
Quand le village de huttes se met à danser
Ou bien à claquer de ses tissus serpents
Ne dites à personne que dedans égale dehors
Que le mauvais temps égale l’haleine de l’estuaire
Que l’île verte égale toutes les gouttes nuages rideaux tirés
Que vous volez la vedette au phare impassible
Trop haut les marches
Trop haut le flot la magie
Trop haut le bouche à oreille.
Tout se joue contre le grain de la terre
Tout se joue dans la rumeur des arbres
Le cahier des histoires au jour le jour
Une histoire pousse l’autre au jour le jour
Les murs tombent au jour le jour.
Va et vient
La parole.
©Maïté L
***
« Elle lui dit:
Il suffit d’une pensée et la colline est fleurie. Ma pensée est une prière. »
Au Matin De La Parole/ Gabriel MWènè Okoundji/ Dialogue d’Ampili et de Pampou
Je suis incertaine sur le pont
Qui mène à l’île rêvée, comme toutes les îles,
Celles que je porte en idéal, avec
Les jeux de tangage et du vent
Celles qui délivreront les paroles et les chants
A mon cœur qui bat d’impatience.
Tambour contre étrave avant l’île-Refuge,
L’île au phare qui s’annonce en lettres essentielles :
Patiras.
Et soudain, comme une révélation :
Vous/ Nou(és) les liens du passé et ceux du présent.
Les cordes se croisent, se tendent, se hissent au soleil.
Des champs de maïs.
Dans la transparence des huttes, le faîte prie le ciel de se souvenir de
L’ici, l’ailleurs, oiseaux plumes musiques, hommes femmes compagnons de besogne
D’esclavage
Noirs.
Toi, Tu Voues ta passion au milan
Qui plane au-dessus des îliens du rêve, ceux qui sont partis, ceux qui se sont établis
Ici
Ceux venus de l’ailleurs pour quelques instants. Ceux qui, noirs, ont souffert dans leurs chaînes.
Pioche, pioche dans le lopin de terre. Erige des cathédrales sur pilotis
Dans la musique des bambous, frontières abolies, végétal étalement vert sombre
Lumière blanchie tout contre
Les lèvres de la terre, gonflées de tout le sel
Qui gercent une fois les marées retirées,
Ici
Gisent les avancées à coup de bois flottés, échoués.
Paroles d’îlouts lancées sur le haut de la berge
Offerte la mélopée d’un soir à l’estuaire :
A lui, le Maître linéaire qui file pressé devant nous.
La tête bercée aux émotions d’herbe, dernières lueurs paroles et chants reçus
Dans le creux vert tendre de l’agora, à l’ombre
Des continents, paroles et chants de souffrance, d’espoir
Wolof
Sorti veine après veine, de la gangue de l’oubli.
Départ Bateau et Gens d’estuaire. Accueil paroles de nuit
Chants d’ici.
Pauillac,
Le quai
S’étire
Orange
La nuit
L’emporte
Glisse la nuit
Avec
Ou
Sans étoiles
Je ne sais pas. Pas vu ailleurs mais dans les yeux, oui … l’espace d’un bonheur.
Impression d’été 2012.
©Maïté L
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J’ai choisi de partir par la fin: les images qui se sont installées dans mes souvenirs. J’ai choisi de prolonger un peu le rêve par des mots. J’ai choisi de dévoiler les images peu à peu.
Mes remerciements vont à ceux qui ont fait de cette soirée un ensemble de vibrations, d’émotions, une escale de bonheur:
– les Scènes d’été du Conseil général de la Gironde
– les associations MC2A (Guy Lenoir) et Musiques de nuit (Patrick Duval) qui ont proposé une rencontre « Ici, ailleurs », autour de la notion de migrations.
– La mise en espace par le collectif de plasticiens « Les Mains dans les pioches« .
– La chorale de l’opéra wolof Leena à laquelle participait notamment la chorale de Pessac Croq Notes donnant l’Oratorio de l’Opéra Leena, musiques de El Hadj N’Diaye et Mathieu Ben Hassen
– la lectures des textes de Michel Quéral, auteur naturaliste, accompagné des musiciens présentés par Musiques de Nuit : 5 musiciens du Monde’ Rocher de Palmer) Pascal Lefeuvre,( vielle à roue), Philippe Bayle( tiple), Pedram Khavar Zamini(tombak) et Doudou Cissoko(kora).
-L’ évocation incantatoire de la mémoire des îlouts, portée par la chorale Pianissimo et contée par Davis De Souza.
» Un voyage autour d’un axe migratoire majeur : l’estuaire de la Gironde.
Toutes ces migrations, proches et lointaines : mémoire de la traite négrière, souvenirs des ilouts, passage des oiseaux mis en scène sur l’île de Patiras par différents regards artistiques. »
******* à suivre*******