Sanguinet(Landes) , 8 mars 2011

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Le ciel à fleur d’eau

Au nord les oies hésitent

Sous les pas le sable

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Au large, peu à peu le lac livre ses secrets: 3000 ans d’Histoire sous les eaux. Au temps où Sanguinet s’appelait LOSA et constituait une halte (mansio)à proximité de la voie gallo romaine  reliant BOÏOS( La Teste-de-Buch) à LAPURDUM(Bayonne): Les landais l’appellent » CAMIN ROUMIOU ».

Les fouilles archéologiques entreprises depuis plus de 30 ans  nous parlent d’une occupation humaine continue de l’âge de bronze à l’époque paléochrétienne.La vie s’organisait autour d’un temple(fanum) et  dans le musée de Sanguinet, on peut voir 2 des 35 pirogues qui ont été trouvées.

Les dernières recherches signalent aussi la présence de silex, de haches en bronze, de bracelets, d’un nombre important de céramiques… Il est probable que ces objets servaient de monnaie d’échange.

De nombreuses pièces de monnaie permettent  de dater avec précision l’occupation des lieux. On a trouvé aussi des restes de cuviers  et de jarres témoignant d’une industrie de production du goudron à partir du pin des Landes.

Les recherches permettent aussi d’en savoir plus sur  la formation du lac et de l’évolution du cordon dunaire . A cette époque, une rivière, La Gourgue suivait une vallée et se déversait dans l’Océan atlantique.

je vous invite, au fil de l’eau, au fil des roseaux à cheminer au bord du lac dans les billets suivants.

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« Prendre un enfant par la main
Pour l’emmener vers demain.
Pour lui donner la confiance en son pas
Prendre un enfant pour un roi.
Prendre un enfant dans ses bras
Et pour la première fois
Sécher ses larmes en étouffant de joie
Prendre un enfant dans ses bras. »

Yves Duteil

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La valise ouverte, négligemment posée,

Regorgeant de jouets pour un temps désuets,

abandonne  au courant, les pensées de l’enfant,

sur la berge et les mirages de l’onde vagabonde.

De ricochet en ricochet, les cailloux du Petit Poucet

bondissent sur la peau de l’eau et  de son cœur

Et taquinent les reflets des herbes et du serpolet.

Où vas-tu mon  enfant , Les mains en avant

Dans ces remous animés de cercles  et de  gouttes

Qui zèbrent d’impatience ton rire en cascade

et tes petites bottes d‘ogre si  fringant,

à croquer la vie qui s’échappe au fil du courant?

L’eau si pure, si transparente te fascine

Lorsqu’elle caresse les algues mouvantes

Et cache dans ses replis, les petites preuves de vie

Qui frétillent au printemps si ardemment.

Mais toi- toi- tu aimes l’eau et les flaques,

Les rives et les vaguelettes de terre ou de mer.

Au kaléidoscope du soleil et de tes  rêves,

Quand tu seras grand, tu reverras le petit homme,

Celui qui posait sa valise dans l’herbe ou sur le pont,

Sans souci de l’heure ou des grands qui grondent.

Tu trouveras gravé dans ta mémoire

Celui qui courait à la rivière, celui qui courait vers l’eau.

Maïté L-2007

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pour écouter le poème:

http://alienor.multiply.com/music/item/1/1

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Merci à tous les acteurs involontaires de ce billet: l’Enfant et sa maman, Yves  Duteil et bien sûr Pelf qui m’avait fait  cette  belle surprise.

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« L’amour comme la mort-qui naviguent hors du temps-lissent nos fronts, affinent nos visages.

Au bord de ce qui est vaste, le regard n’erre plus; et le souffle, complice de l’angoisse et des jours, trouve enfin sa paix« 

ANDREE CHEDID

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Ceux qui me connaissent un peu savent combien j’ai eu de plaisir à revenir souvent  dans les écrits d’Andrée Chedid pour les lire et les faire connaître. Souvent ses citations accompagnaient mes photos.

L’âge était là. Et très récemment j’ai eu envie de lire son roman  » Les QUATRE MORTS DE JEAN DE DIEU ». Je me doutais que ce combat des héros face à la mort était prémonitoire. Ce livre m’a fait très mal surtout à la fin. mais il recèle aussi tant de beauté, tant d’amour, tant de douleur! la fin m’a laissée très démunie. Je ne dévoilerai rien de plus que ce que vous pourrez lire par ailleurs si vous faites la démarche de découvrir ce livre.

Je ne peux imaginer Isabelita que flottant, flottant comme Andrée Chedid au-dessus des siens: ses enfants et nous ses lecteurs qui savions que la fin était proche.

Parmi ses poèmes, je pourrais en citer certains qui s’accordent avec la nouvelle de sa mort: » LA TRAVERSEE DE L’ABSURDE » ou bien encore « EN FRICHE ».

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Mais je terminerai plutôt sur

Brève invitée

à ma fille

Ma lande mon enfant ma bruyère

Ma réelle mon flocon mon genêt

Je te regarde demain t’emporte

Où je ne saurais aller.

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Ma bleue mon avril ma filante

Ma vie s’éloigne à reculons,

A toi les oiseaux et la lampe

A toi les torches et le vent.

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Mon cygne mon amande ma vermeille

A toi l’impossible que j’aimais

A toi la vie, sel et soleil,

A toi brève invitée.

ANDREE CHEDID

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Et la nuit tomba

De ses heures écorchées

En corolles où les flammes avaient regagné leur couche

Circonvolutions d’œillets dans les plis desquels les lèvres étaient liées

A des martèlements de tambours battant l’angoisse

Le dilemme, la peur, les mots aux angles non équarris

Insomnie jouant à saute-mouton tombant dans le vague

De l’inconnu au manteau de fantôme grisé, noirci d’échos

Refusant la clarté et la douceur apaisante

Froissant sur l’oreiller le grain de peau de la joue

Désarticulant le corps comme un pantin

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Et la nuit tomba

A nos pieds de statues du soir, devant nos yeux incrédules

Occultés par le voile de lumière lancinant et tombant dru

S’échappant en bribes, en papillons impressionnistes.

Il y avait tant de jours oubliés, qui n’avaient pas été consommés

Tant de paroles rentrées en gorges profondes, tant de sensations

De peaux veuves du toucher, tant d’années écoulées dans l’oubli

De soi, de l’autre et des océans muets malgré leurs ardeurs de marées

Tant de soleils venus se mirer dans les eaux bleues, dans les eaux irisées

Tant de mots à la coque vide flottant au gré des sourires figés sur la toile

Parcheminée de poussière jamais chassée et qui retombait au gré des vents.

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Et la nuit tomba

Elle pantelait comme  tant d’espoirs blessés, abandonnés à l’épreuve du temps.

Elle s’abandonna et se laissa flotter dans les particules immatérielles

Succédant à chaque incendie, à chaque avancée des flammes du couchant.

L’homme avait oublié son filet à papillons de lumières dans le coffre des jours.

Il se contenta des rayons obliques qui l’obligeaient à fermer ses paupières

Emportant dans son cœur quelques semelles d’oubli, quelques semelles du vent

Quelques envols qui l’avaient surpris et l’avaient laissé encore plus riveté au sol.

Il s’en alla de son pas pesant, retrouvant les tambours au tempo hallucinant

Chaque minute le rapprochait du monde noir où il percevait de la lune

Les plein similaires à ses  vides qui le poussaient à mettre les voiles.

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Si le domaine de Certes m’était conté:

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Le ciel bayadère

Ou berlingot roulant sous la langue

Orange passion funeste

Ou rêves grenade non dits.

Le ciel a l’ incroyable clameur pantelante

De ses feux d’amour semés atout vent

L’irréel jeté à nos pieds

Nos bouches closes.

Roses les eaux des chenaux.

Roses les passe-temps

Sur le sentier.

Rose conte à rebours.

Maïté L

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Il arrive parfois que le bleu nous envahisse, nous garde à la lisière des mots, que la page reste blanche sous le plafond des heures penchant vers la terre.

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«  Ne croyez pas que tout ce bleu soit sans douleur »

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Point de naïveté, d’oubli durable mais un parti-pris de l’iris.

Le bleu n’est-il qu’un leurre, une illusion d’optique, un théâtre d’interdit?

Bleu suave, bleu de velours, flottant tel une brume sur le paysage.

Le paysage, ce costume de l’âme où glisser la légèreté du paraître.

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«  Nous sommes ici pour peu de temps : quelques mots, quelques phrases, si peu sous les étoiles, rien que cela, parmi tout le reste. Du bleu dans la bouche, jusqu’à la dernière heure. Voix blanche, voix tachée, conjurant la mort, écoutant sans effroi craquer les os du ciel et de la mer.« 

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Les citations entre parenthèses sont de Jean-Michel Maulpoix.

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à hauteur du regard, un bateau passe, glissant vers des contrées plus claires.

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Le regard captivé par  les touches pianotées rouge braise, or sur glace.Le soleil gagne les visages, généreux, horizontalement puissant.

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Aucun tremblement de l’air coupant comme verre à pied-d’œuvre versant le métal de l’hiver en fusion sur les dernières minutes possibles d’immobilité.

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Le regard de loin en proche à la recherche du labyrinthe hanté par le soir en couches successives, fondues, plaquées, superposées, révélées au plus offrant.

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Le souffle court sur le miroir des heures propices à l’envol de l’esprit.

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Décorporation.

Être le bateau qui rentre au port.

Être l’eau qui vient de la presqu’île.

Être le ciel dans son fourreau de danse maléfiquement pur.

Être.

Samsara.

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Être infiniment soir.

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Derrière les roseaux, une autre scène se préparait. La marée nourrissait l’espace mètre après mètre; Le soir venait en renoncement au jour. Le domaine de Certes s’endormait dans ses coins secrets. Côté Bassin, tout allait se jouer. Les rares promeneurs cédaient la digue: la frontière entre deux mondes antagonistes;la digue au-delà de laquelle les chasseurs se mettaient à l’affût. Comme le dit l’un d’entre eux, fusil prêt à la détente,  si les canards et autres sarcelles s’aventuraient hors de leur espace protégé, ils entreraient dans le champ de tir et deviendraient gibier. Il avait suffi d’une coloration subite du ciel; il avait suffi que le bleu ait moins de pouvoir pour que le renversement d’influences s’opérât.

Heureusement , tout le temps que dura le coucher du soleil, nous n’entendîmes pas un seul coup de feu.

Horreur et peur des armes.

« L’azur, certains soirs, a des soins de vieil or. Le paysage est une icône » écrit Jean-Michel Maulpoix; il trouve tant d’échos en nous tous avec son bleu qui est aussi le nôtre.Une icône, qui comme beaucoup d’icônes venait là de perdre sa valeur sacrée avec l’apparition du soir. Comme souvent, les icônes sont voisines des armes.

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