Dans la nuit du samedi 1er juin au dimanche 2 juin
« Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés
Ailes couvrant le monde de lumière
Bateaux chargés du ciel et de la mer
Chasseurs des bruits et sources des couleurs »
PAUL ELUARD
Nous n’étions pas à Bordeaux pour voir le feu d’artifice, mais au retour de notre virée, nous avons fait un grand crochet, non prémédité, pour apercevoir le Cauhtémoc de nuit. L’apparition du bateau fut à la hauteur de nos attentes.
La rive droite, lorsqu’on s’éloigne du Pont de pierre est bien sombre : Nous apercevons un groupe de grands buveurs reconnaissable au nombre de bouteilles vidées, dont nous nous écartons prestement. Nous préférons nous approcher d’un photographe venu comme nous contempler la rive gauche depuis La Bastide où l’on a le meilleur point de vue sur le Port de la Lune.
L’approche progressive du trois-mâts nous mènera près de lui. Une fois passé le Pont Chaban-Delmas, la foule amassée pour le feu d’artifice ayant déserté les lieux, les quais sont paisibles ; nous pourrons au mieux profiter du spectacle du bateau éclairé, spectacle dont j’aurai du mal à me détacher, je l’avoue.
Rive droite :
Dans l’herbe mouillée
Du bout du doigt suivre le liseré des lucioles
Qui montent, descendent sans bruit au loin.
Sur l’autre quai, les toits blancs éphémères et
Suivre La Barque immobile et puis s’approcher
Du fleuve roulant sa charge, ses paquets.
La brise et le vent de roseaux affleurent
Cheveux dans le cou, cache-cache entre les bosquets
Le noir en trombe d’arbres déchiquetés,
Les bouillonnements faisant flots vers l’estuaire.
Tous feux éteints les eaux cuivrées ou
Le Pont de pierre en arches, moi suspendue aux fils de la nuit
Aux fils de la ville, à ses lampes-tempête, ses lanternes élevées.
La colonne des Quinconces et ses ailes vertes
D’insecte livré à l’asphalte loin des herbes sèches
Chaque pas nous rapproche de la communion
De l’immobile danse et de la courbure de la coque.
Il est déjà 1h 30 ou plutôt 2h,le temps ne compte plus
La morsure de la nuit, du froid se glisse sous la chemise
Au plus près du rêve qui palpite et s’imprime recto verso.
Rive gauche :
Il est là : En majesté les voiles à demi-relevées
Ses belles d’aventures aux jupons de pervenche
Retroussées loin des hautes cheminées,
Les mâts et les drapeaux, pour ne jamais oublier
Dans le fracas des bordées, qu’un bateau à quai
A des fourmis dans la proue, et des envies de marées.
« La nuit se baigne dans les puits
Le risque de mourir s’annule
Comme deux des chiffres zéro
Une mousse de bleuets
A blanchi jusqu’à la corde
La grand’ voile de couleur »
PAUL ELUARD
C’est sa dernière nuit à quai
Mais je ne le sais pas encore…
Je l’apprendrai quelques heures plus tard et…
Ce sera encore une fois de plus…la course..à suivre !
Maïté L
« Oui, ce soir, dans le silence
De la nuit
Le monde sans fin, sans bruit,
Se balance »
FERNAND GREGH