DésaCorps
Désaccords entre le corps qui vieillit et la tête qui ne perd pas une miette de son enfance ; Des accords malgré tout parce que le résultat est époustouflant.
Des corps à corps ; des corps à cris ; des corps à vivre, à supporter, à sourire et à rire le plus souvent possible.
Oui, bien sûr parfois la mémoire s’en va laissant des bulles de vide, des blancs, des points d’interrogation, des points de suspension. Silences toujours.
Et puis soudain du mouvement, du projet où dansent les corps, aux mains qui s’affairent, semaine après semaine, mois après mois… PUIS surgit la parole.
Celle de Yves, Madeleine, Paulette, Reine, Marie-Josée, Félix, Christiane, Edith ; précieuse dans ce qu’elle imagine, ce qu’elle dit et ne dit pas, ce qu’elle cache du naufrage de la vieillesse et celle qui dit le bonheur d’être là, de vivre.
C’est tout cela que l’on ressent en entrant dans l’exposition DésaCorps à la médiathèque Jacques Ellul de Pessac (Gironde). Tout à coup nous voilà en proie à l’émotion, alors que la musique d’antan nous accompagne. Nous entrons dans l’intimité de ces personnes de L’EHPAD La Maison de Fontaudin, toujours à Pessac ; nous entrons dans le projet de leurs accompagnants qui y ont cru et l’ont mené à son terme.
Il s’agit là d’un projet de longue haleine où les mains ont pétri, façonné, malaxé, où les acteurs se sont confrontés à la difficulté de la réalisation, celle qui crée un abîme entre le corps vécu, imaginé, représenté en deux dimensions par le biais de la photo avant de parvenir à le traduire en trois dimensions. Mais il y avait aussi le corps à saisir en mouvement au cours du bal festif: difficulté supplémentaire!
Il y a aussi les « petites souris » qui ont guetté chaque instant et nous donnent à voir l’album de l’avancement du projet, toutes les expressions et la concentration des acteurs.
Justement, ces fameux traits du visage, ces particularités de la silhouette, il fallait les croquer et faire émerger la beauté du geste, la beauté intrinsèque à chacun. Avoir habillé chaque sculpture avec les habits portés par leur double humain nous projette dans une tranche de vie ; le décor soigné, coloré, chaleureux est aussi un témoignage des jeunes années de nos anciens.
D’aucuns ont compris l’importance du regard « Tant que ses yeux ne parlent pas, on ne peut saisir qui elle est ». Ce regard qui nous caractérise, qui n’appartient qu’à nous et nous accompagne jusqu’au dernier jour, laisse entrer la lumière, la joie et restitue au centuple ces précieuses expériences de vie.
Il me reste à saluer aussi bien ceux qui font bouger la vie à l ‘EHPAD avec un projet d’une telle sensibilité et d’une telle ampleur ainsi que les participants.
L’exposition se termine à la médiathèque Jacques Ellul mais elle ira réveiller d’autres consciences ailleurs.
Merci.
♥
Il y eut ceux de passage qui se prirent au jeu du dialogue, du mouvement: