« Je serais bien l’enfant abandonné sur la jetée partie à la haute mer, le petit valet, suivant l’allée dont le front touche le ciel. »
Arthur RIMBAUD / Illuminations
BALBUTIEMENTS
Te souviens-tu? Il y a si longtemps …
C’était au temps où je ne te voyais , toi la mer, qu’une à deux fois par an. La première fois peut-être.
Une partie de mer gâchée.
Un petit garçon de mon âge avait eu si peur de toi qu’il s’était enfui à toutes jambes, loin, loin dans les dunes. Il avait fallu courir en tous sens pour le retrouver.
Et c’était déjà l’heure de s’en aller.
L’autobus n’attendait pas les retardataires.
Le Grand Crohot/ Maïté L
et toi l’enfant qui découvris l’océan à travers les châteaux de sable: je me souviens de ton bob rouge. Tu as bien grandi et tu n’aimes plus la sensation des grains de sable entre les orteils.Te souviens-tu du jour où attiré par la forte marée, tu voulus dès l’arrivée voir cette muraille d’eau qui t’aurais roulé comme un fétu de paille.
Il fallait bien protéger ta peau blanche et tes cheveux blonds des assauts du soleil. D’ailleurs le soleil couchant te convenait mieux, lui qui dorait doucement ta tendre peau.Papa, maman , le seau et la pelle et le goûter à l’ombre du parasol qui parfois s’échappait pic sur la pointe et pac sur la tête, volé par le vent de mer.
sur la plage , au crépuscule,
Les ombres des châteaux
étendent leurs tentacules,
Et gourmandent les vagues
qui , à coups de langues;
lèchent ,un à un, les grains de sable.
Châteaux abandonnés,
Ruines sans armes ni ronces,
sans amour ni pervenches,
Forteresses et petits goûters
Des jours d’enfance ensoleillée.
Entre les vols furtifs de mouettes,
et les noires silhouettes,
Main dans la main,
La caresse des algues
et l’ivresse du vent
les couchent inexorablement
Au fond des océans.