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Il est un second phénomène, mais ce n’est peut-être, lui, que l’autre face de la nuit, son négatif de blancheur. Le brouillard…En ce temps-là, une inondation vaporeuse, une opaque buée débordait le lit du fleuve, transformait en spectres grues et hangars, gagnait implacablement les quartiers proches des quais, la ville entière. Bordeaux, comme Saint-Pétersbourg, connaissait alors « ses nuits blanches. Elles n’étouffaient pas seulement les formes, mais aussi les sons, les voix, les réduisant à leurs propres échos…. »
Michel Suffran
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Parfois le Pont se fait sombre
Le temps d’un ciné
Dans le brouillard la ville s’estompe
Au temps minéral bordelais s’unit
Avec une douceur qui n’est que lacis
Le temps folle bille en tête
Le jour s’effiloche et tombe dans l’oubli
Le temps d’une bulle légère
Les passants frileux se pelotonnent
Le temps d’un carillon en folie
Bientôt ténus comme des ombres
Le temps d’un rêve
Grise grisaille muraille au fil rompu
Le temps d’un abordage
Avec le ciel de cendre uniformément repenti
Au temps des roseaux
Les voix tombent en à-plats et ne portent plus
Le temps d’une ritournelle batelière
L’écho des cris, des rires, des chants ravalés
Le temps d’une danse
Le tram s’articule, gémit comme voiture hantée
Le temps d’un port relégué
S’ouvre, se ferme, s’élance, échappe au Lion
Le temps de prendre la clé Deschamps
Et s’en va cahoter vers l’horloge du temps
Le temps Far-Est, d’une gare d’Orléans
Le temps de fermer les yeux.
Maïté L
à suivre, le temps de neige…
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Bordeaux la blanche surgit un jour de la nuit…